Quelles allègements de charges sociales pour l’embauche des seniors en 2024 ? Panorama complet

31 août 2025

Contexte : L’emploi des seniors, un enjeu économique majeur

La population active française vieillit : selon l’INSEE, la part des actifs âgés de 55 à 64 ans est passée de 8,6% à 13,6% en vingt ans (INSEE, 2023). Cependant, le taux d’emploi des seniors en France demeure faible par rapport à la moyenne européenne : 56,9% pour les 55-64 ans en 2022, contre 62,3% dans l’Union européenne (Parlement Européen).

Ce taux d’emploi, bien inférieur à celui, par exemple, de l’Allemagne ou de la Suède, s’explique en partie par le manque d’incitations claires pour l’embauche de cette tranche d’âge. L’accès à l’emploi est d’autant plus difficile que la durée médiane de chômage des plus de 50 ans reste deux fois supérieure à celle des moins de 25 ans (DARES).

La réalité des exonérations de charges sociales spécifiques aux seniors : état des lieux

Contrairement à une idée largement répandue, il n'existe pas de dispositif d'ordre général accordant une exonération totale ou significative des charges sociales spécifiquement pour l’embauche de seniors (à la date de juin 2024).

Retour sur les dispositifs passés

Au fil des années, plusieurs dispositifs ont existé, souvent à titre temporaire, pour inciter à l’embauche de demandeurs d’emploi de plus de 50 ans. Par exemple, l’exonération Fillon seniors (exonération de cotisations patronales limitées dans le temps) ou l’aide contrat senior, supprimés depuis respectivement 2010 et 2017.

  • Le contrat de génération (2013-2017) : abattement de charges pour entreprise embauchant un jeune et maintenant un senior (à partir de 57 ans). Fin officiel du dispositif en 2017 (Ministère du Travail).
  • Aides à l’embauche de chômeurs de longue durée (dont seniors), supprimées progressivement à partir de 2018.

Aujourd’hui, il n’existe aucune exemption « automatique » liée uniquement à l’âge supérieur à 50 ou 55 ans du salarié recruté dans le secteur privé.

Dispositifs de réduction de charges sociales accessibles pour l’embauche des seniors en 2024

Même si aucune exonération n’est dédiée exclusivement aux seniors, certains dispositifs généralistes ou ciblés sur d’autres critères (chômage de longue durée, contrat aidé) peuvent s’appliquer et concerner de fait de nombreux seniors.

1. Les aides à l’embauche de demandeurs d’emploi seniors

  • Contrat de Professionnalisation « senior » :
    • Peut être conclu avec une personne de 26 ans et plus sans emploi, sans limite supérieure d’âge.
    • Pour un salarié de 45 ans ou plus indemnisé par Pôle Emploi, exonération de la totalité des cotisations patronales de Sécurité sociale relatives au contrat (sauf accidents du travail/maladies professionnelles et cotisations complémentaires).
    • Montant plafonné sur la part du SMIC correspondant à la rémunération.
    • Source : Service-Public.fr
  • Emploi Franc+ ou Parcours Emploi Compétences :
    • Cible surtout les allocataires de minima sociaux et habitants de quartiers prioritaires, mais nombre significatif de seniors concernés.
    • Aides financières et faible coût du travail, sans baisse directe des cotisations sociales.

2. Les réductions de charges sociales générales

  • Réduction Fillon (allègement général des cotisations) :
    • S’applique à tous les salariés, quel que soit l’âge, dont la rémunération ne dépasse pas 1,6 fois le SMIC.
    • Prend tout son sens pour un retour à l’emploi sur des salaires proches du SMIC, situation fréquente pour des seniors en reconversion.
    • Source : URSSAF

3. Les dispositifs dans l’insertion par l’activité économique

Dans le secteur de l’insertion sociale, de nombreux contrats aidés (CUI-CAE/PEC, CDDI) sont éligibles aux adultes de plus de 50 ans éloignés de l’emploi :

  • Exonérations ou allègements de charges patronales selon l’aide allouée à la structure.
  • Impact limité au secteur associatif, collectivités et structures de l’IAE.
  • Source : Ministère du Travail

Ce qui n’existe plus (ou plus sous cette forme) : attention aux idées reçues

  • Pas d’exonération sociale systématique pour « senior » :
    • Ni les embauches à temps plein ou partiel d’un salarié > 50 ans, ni le CDI, n’autorisent à elles seules un quelconque dispositif d’exonération patronale spécifique en 2024.
    • La notion « d’allégement senior » est aujourd’hui obsolète.
  • Pas de franche réduction fiscale directe liée à l’embauche d’un senior dans le secteur privé ordinaire.
  • Pas de cumul automatique de pensions et exonérations :
    • Le cumul emploi-retraite, en forte hausse chez les plus de 60 ans (passé de 500 000 à 900 000 entre 2011 et 2023 - CNAV), n'ouvre pas de droits patronaux spécifiques côté charges sociales à l'embauche.

Pourquoi ces exonérations ont-elles disparu ? Quelques éléments d’analyse

Les exonérations ciblées sur les seniors ont souvent montré des résultats décevants sur l’emploi durable, tout en générant des effets d’aubaine pour les entreprises qui auraient de toute façon recruté ces profils (rapport Cour des comptes, 2022).

  • Explosion du coût global pour les finances publiques : jusqu’à 400 millions d’euros par an pour le « contrat senior » avant 2010.
  • Difficulté d’assurer un ciblage précis : certains dispositifs étaient captés en majorité par de grandes entreprises déjà capables de recruter.
  • Volonté de l’État aujourd’hui de privilégier les mécanismes « universels » ou conditionnés à la situation de longue durée au chômage.

Toutefois, quelques collectivités territoriales testent encore des aides à l’embauche pour les plus de 50 ans, principalement en direction des TPE/PME ou artisans (ex : Région Auvergne Rhône-Alpes, Département de la Loire) mais à des conditions restrictives, à vérifier localement.

L’employabilité des seniors : leviers alternatifs pour convaincre un employeur

  • Mise en avant de l’expertise : De plus en plus d’entreprises réalisent que la réinsertion de seniors forme aussi une réponse à la pénurie de compétences, notamment dans l’industrie, le BTP ou l’ingénierie (étude Observatoire des métiers, 2023).
  • Formation continue et validation des acquis : dispositifs type CPF, Validation des Acquis de l'Expérience (VAE).
  • Dispositifs de tutorat et mentorat : Plébiscités dans les ETI et grandes entreprises, qui valorisent l’intégration de profils expérimentés pour accompagner les plus jeunes.
  • Adaptation des conditions de travail : temps partiel, horaires flexibles ou télétravail, atouts cités par 39% des employeurs comme facteur clé d’embauche des seniors (DARES, 2023).

L’absence de mesures « automatiques » ne doit pas occulter les marges de manœuvre que possèdent certains employeurs soucieux d’une gestion active des âges dans leur effectif.

Perspectives d’évolution : quid d’un futur « choc d’employabilité » senior ?

La question des incitations financières à l’embauche des seniors a ressurgi lors du débat sur la réforme des retraites de 2023, mais sans traduction immédiate. Plusieurs scénarios sont en discussion :

  • Réinstauration ciblée d’une aide pour l’embauche de plus de 55 ans au chômage de longue durée.
  • Bonification sur la baisse des charges pour les entreprises recrutant un senior précédemment en insertion professionnelle.
  • Expérimentations ponctuelles sous forme de « primes à l’embauche » (à l’étude, non acté au niveau national).

Reste que l’État privilégie, à ce jour, la transformation du marché du travail sur le long terme à de simples incitations. Une veille attentive sur les annonces des pouvoirs publics est donc recommandée pour les employeurs et les candidats concernés.

Pour aller plus loin : où s’informer en temps réel sur les aides et exonérations ?

  • Pôle Emploi / France Travail : rubrique « aides à l’embauche » régulièrement mise à jour.
  • Service-public.fr : simulateur d’aides par profil.
  • URSSAF : détails sur les exonérations applicables, simulateurs et fiches synthétiques selon situation.
  • Conseillers CCI et CMA : accompagnement personnalisé pour les TPE/PME recherchant des aides locales.

Un tableau récapitulatif des principaux dispositifs actuels est disponible sur le site du Ministère du Travail (travail-emploi.gouv.fr).

À retenir : embaucher un senior, entre pragmatisme et engagement

Si la France n’accorde plus de larges exonérations de charges sociales « seniors » comme par le passé, l’embauche d’un profil expérimenté reste encouragée par des dispositifs indirects et des logiques d’accompagnement (formation, insertion, flexibilité RH). Pour l’employeur, la clé sera d’identifier clairement l’apport du recrutement d’un senior, au-delà du critère d’âge strict.

Pour les candidats, comprendre les réalités administratives du marché facilite une démarche active, dégagée des idées reçues – et motive la mise en avant de compétences rares, de la polyvalence et de la volonté d’investir dans de nouveaux projets professionnels.

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