Le fonctionnement précis de l’aide à l’embauche des seniors après 57 ans

13 août 2025

Un enjeu national : Pourquoi une aide pour l’embauche des seniors ?

En France, le taux d’emploi des 55-64 ans reste inférieur à la moyenne européenne : en 2023, seulement 56,9% de cette tranche d’âge occupe un emploi, contre 62,7% dans l’Union européenne (INSEE). Pour les 60-64 ans spécifiquement, la chute est plus marquée : 37,9% en France contre plus de 46% dans l’UE. Or, le recul de l’âge de départ à la retraite et le vieillissement de la population renforcent la nécessité de soutenir l’employabilité des plus âgés.

Pour encourager entreprises et associations à recruter des seniors éloignés de l’emploi, l’État français met en place des dispositifs ciblés, dont l’aide à l’embauche des demandeurs d’emploi de 57 ans et plus. Cette mesure vise à lever deux blocages majeurs : limiter la discrimination à l’embauche et compenser, au moins en partie, certains freins économiques (rémunération, adaptation…)

À qui s’adresse l’aide et quels contrats sont concernés ?

Des critères précis à respecter

  • Âge : être âgé d’au moins 57 ans au moment de la signature du contrat.
  • Statut : être inscrit comme demandeur d’emploi à Pôle emploi, quelle que soit la durée d’inscription.
  • Nature du contrat : CDI ou CDD d’au moins 6 mois. Les contrats saisonniers sont exclus du dispositif.
  • Employeurs concernés : entreprises du secteur privé, associations, entreprises adaptées, mais pas les particuliers employeurs ni la fonction publique.

Il est important de noter que l’aide ne s’applique pas si le senior est embauché après avoir déjà travaillé pour la même entreprise au cours des 6 derniers mois (ni en intérim ni en sous-traitance).

Montant de l’aide et modalités de versement

Ce que les employeurs peuvent attendre financièrement

L’aide financière s’élève à 2000 € maximum, versée en deux temps :

  • 1 000 € après 6 mois de présence effective du salarié,
  • 1 000 € supplémentaires après 12 mois de contrat, à condition qu’il soit toujours en poste.

Si le contrat prend fin plus tôt, l’aide est proratisée. À noter : en cas de temps partiel, l’aide est calculée au prorata de la durée de travail.

La demande d’aide doit être faite via la plateforme de l'Agence de Services et de Paiement (ASP) dans les 3 mois suivant l'embauche.

Les démarches côté employeur

  1. Présenter un dossier de demande en remplissant le formulaire dédié (disponible sur le site de l’ASP).
  2. Joindre les pièces justificatives demandées : copie du contrat de travail, attestation d’inscription à Pôle emploi…
  3. Respecter le calendrier : effectuer la demande dans un délai de 3 mois à partir de l’embauche.
  4. Informer précisément le salarié senior de la mobilisation de ce dispositif – un point important pour la transparence du recrutement.

L’aide n’est pas cumulable avec certaines autres aides à l’embauche (jeunes, alternance…), mais reste compatible avec l’embauche de travailleurs handicapés ou les emplois francs, qui ciblent d’autres formes d’exclusion.

Ce que change cette aide pour le recruteur et le senior

Des effets concrets, mais encore marginaux

  • Pour les employeurs : la mesure permet de compenser en partie le coût d’un recrutement perçu comme plus risqué (rémunération à l’ancienneté, adaptation, etc.). Certaines PME y voient un levier pour diversifier leurs équipes et gagner en expérience sans sacrifier leur budget.
  • Pour les seniors en recherche d’emploi : ce dispositif peut faire pencher la balance lors d’un entretien et rassurer l’entreprise sur la prise de risque. Il permet aussi de valoriser la stabilité et l’expertise auprès de recruteurs hésitants.

Cependant, selon une étude du ministère du Travail, moins de 13 000 embauches ont bénéficié de ce soutien sur l’année 2022 – loin des volumes nécessaires pour infléchir significativement la courbe du chômage senior.

Des illustrations concrètes : profils et types d’emplois concernés

Contrairement à une idée répandue, il ne s’agit pas uniquement de postes peu qualifiés. Les profils embauchés avec l’aide sont variés : cadres expérimentés, techniciens, agents administratifs, commerciaux, métiers du service à la personne…

  • Un exemple : une PME du Loiret a recruté en avril 2023 une responsable administrative de 58 ans en CDI grâce à ce dispositif, après 14 mois de chômage – elle a permis à l’entreprise de structurer ses process et d'améliorer la gestion RH.
  • Autre cas : à Lyon, une association d’aide à domicile a embauché deux seniors en CDD de 8 mois, à temps partiel, en valorisant leur expérience auprès des personnes âgées (Pôle emploi, 2023).

Limites et conditions souvent méconnues

  • Le plafond : 2 000 € représente un « coup de pouce », mais ne compense pas un écart salarial important pour de hauts profils.
  • La non-rétroactivité : aucun effet si la demande n’est pas faite dans les 3 mois suivant l’embauche.
  • L’absence de renouvellement : pour un même salarié, l’aide ne s’applique qu’une fois, et pas pour des contrats renouvelés ou transformés en CDI.
  • Le cumul : il existe des limitations avec d’autres aides et exonérations – chaque cas doit être examiné avec Pôle emploi ou l’URSSAF.

Enfin, la question du maintien dans l’emploi reste entière : au-delà de l’embauche, il est nécessaire d’accompagner la formation continue et la transmission des savoirs pour sécuriser à long terme le parcours du senior.

Derrière les chiffres : que nous disent les recherches et les tendances ?

Les indicateurs sont contrastés : selon la Dares, un senior inscrit à Pôle emploi depuis plus d’un an a seulement 8% de chances de retrouver un emploi durable dans l’année (Dares, 2023). Pour autant, 73% des employeurs ayant bénéficié de l’aide à l’embauche se disent satisfaits, évoquant la fidélité, l'autonomie et la transmission des compétences comme avantages-clés (Dares, enquête 2023).

Le dispositif ne lève pas à lui seul tous les freins : la culture d’entreprise, les préjugés sur les capacités d’apprentissage ou de mobilité restent des obstacles majeurs. Cependant, la dynamique est encourageante : entre janvier et septembre 2023, le nombre d’embauches de seniors de plus de 57 ans a augmenté de 5,8% (source URSSAF).

Pour les demandeurs d’emploi concernés, bien connaître ce levier et le mentionner dès la candidature peut constituer un véritable atout pour renforcer leur dossier face aux employeurs hésitants.

Optimiser sa recherche : conseils pour valoriser ce dispositif

  • Renseignez-vous précisément : Pôle emploi et les missions locales disposent de référents « senior » habitués à accompagner les dossiers éligibles.
  • Mentionnez l’aide dans vos candidatures : pour rassurer l’entreprise sur l’aspect financier.
  • Préparez un argumentaire : montrez que votre expérience est un gage d’efficacité, de rapidité d’intégration et de capacité à résoudre les problèmes opérationnels.
  • Surveillez les opportunités du secteur associatif et des PME locales : ce sont souvent elles qui mobilisent le plus facilement ces dispositifs.
  • Soyez vigilant sur les délais administratifs : une démarche trop tardive fait perdre tout droit à l’aide.

Vers une évolution des aides aux seniors : perspectives récentes

La concertation sur l’emploi des seniors initiée fin 2023 prévoit de renforcer les aides à l’embauche : le volet senior du nouveau « pacte de la vie au travail » est en discussion et pourrait voir émerger de nouveaux outils, parmi lesquels un « CDI senior » encore à l’étude (Ministère du Travail). Ces évolutions devront s’accompagner d’une lutte résolue contre l’âgisme et d’actions en faveur de la formation offrant de vraies perspectives de reconversion.

Enfin, si l’aide à l’embauche des seniors de plus de 57 ans offre aujourd’hui une réelle opportunité, elle reste à intégrer dans une politique globale, mêlant sécurisation des parcours, transmission intergénérationnelle et évolution des regards portés sur le travail passé 50 ans.

En savoir plus à ce sujet :